Centre de Recherche sur les Poétiques du XIXe siècle
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Monstres et monstrueux dans l’œuvre d’Emile Zola, sous la direction d'Alain Pagès. Thèses soutenue le 16 juin 2015.
Le naturalisme prétendant inclure tous les aspects de la vie, la question de la monstruosité omniprésente dans l’œuvre de Zola peut se traiter sous l’approche du monstre en tant qu’être exceptionnel comme sous celle du monstrueux applicable à chaque nuance de physiologie, de caractère, de comportement ou de sensibilité. La présence des monstres chez l’auteur est concurrencée par son usage plus général du monstrueux lui permettant de concilier une poétique de l’ordinaire et un objet narratif qui ne l’est pas pour tout dire de la complexité de l’existence. Si le monstre désigne d’abord l’être biologique contrefait, l’influence du milieu et de l’hérédité conditionne son apparition : face à différents règnes naturels monstrueux l’homme est menacé de succomber ou de le devenir à son tour ; les anomalies physiques se transmettent d’un parent à son descendant mais même guettent n’importe qui à tout âge. L’œuvre de Zola met ainsi en lumière les aveux des corps mais exprime déjà un changement de regard porté sur les malheureux affublés de tares et leurs juges improvisés. Puis, dans une lecture morale, la quasi-totalité des personnages est susceptible d’être le monstre d’un autre tant c’est là un concept peignant les angoisses et les méfiances inhérentes aux rapports humains, à moins de cibler des mécanismes pernicieux comme ceux de bêtise ou d’hypocrisie pour montrer que n’est pas toujours monstrueux celui que l’on croit ; la mythologie zolienne où monstres et monstrueux occupent un rôle central permet à ce titre de reprendre des thématiques ancestrales et de les adapter au monde contemporain. Approprié par l’écrivain, le monstrueux en régime zolien devient alors un véritable sujet esthétique. Le plus grand monstre aux yeux de qui peine à créer, c’est en définitive l’œuvre d’art elle-même qu’il faut maîtriser par un labeur patient : c’est l’œuvre problématique, trop exigeante, et le monstrueux qualifie ce qu’on rejette en elle comme le laid, l’obscène, le mensonger. Zola en a été lui-même la victime, qu’il s’agisse de ses textes ou de sa propre personne déformés par des parodies, des caricatures ou des attaques ad hominem.