Marion Croisy
La question pénitentiaire vue par les romanciers: les écrivains et la prison, les représentations de la prison dans les récits de 1830 à 1900, sous la direction de Paolo Tortonese. Thèse soutenue le 2 décembre 2016.
Au XIXe siècle, les représentations de la prison par la littérature sont nombreuses. Études de mœurs et tableaux parisiens explorent l’univers carcéral, et un certain nombre de romans racontent des épisodes d’emprisonnement (Sue, Les Mystères de Paris, Balzac, Splendeurs et misères des courtisanes, Goncourt, La Fille Élisa). La fascination que suscite la prison dépasse largement la seule communauté des hommes de lettres : enquêteurs, hygiénistes, théoriciens du système pénal, s’emparent aussi de cette question. Le XIXe siècle constitue dans l’historiographie contemporaine un moment déterminant de l’histoire pénale. La prison, depuis la Révolution, est perçue comme la clef de voûte d’un nouveau système de sanction. Cette étude, qui privilégie le regard extérieur sur la prison – celui de l’homme qui n’y est pas enfermé – et le récit à la troisième personne pour les fictions romanesques, s’intéresse aux représentations littéraires de la prison à la lumière de cette mutation historique. Tissant des liens avec les domaines du savoir qui accompagnent l’avènement de la prison pénale, la littérature prend une part importante au discours social qui représente, autant qu’il la construit, la modernité carcérale. De ce discours, le lecteur ne pourra manquer de relever les ambivalences et les contradictions. Roman d’aventures et roman de mœurs sentimental, roman de l’enquête sociale et roman édifiant, roman réaliste et roman naturaliste seront tour à tour explorés pour témoigner de la diversité des figurations. Les implications politiques et morales, esthétiques et poétiques de la représentation par la fiction de l’expérience de l’incarcération constituent un enjeu majeur de cette thèse.